"Tout a commencé par une souris"
Walt Disney
Ciel mitigé, vent nul, navigation au moteur. mais pain magnifique dans son petit panier. On ne peut pas tout avoir. Et en plus, une dorade coryphène qui s’accroche. Bonaire s’annonce sous de bons auspices. La sournoise. Comme on va le constater dès l’arrivée, on ne peut même plus se fier aux signes positifs du destin.
Tout a commencé un soir d’octobre, au soleil couchant. David Vincent naviguait sur une route de campagne isolée quand soudain… Ah, mais non, je me trompe de film! L’arrivée à Bonaire, ça tenait plus de “Bateaux au bord de la crise de nerf” que de “Rencontre du troisième type”. Après avoir remonté toute la côte sous le vent, bien sagement à la queue-leu-leu, les quatre mousquetaires de la mer se dirigeaient droit sur la baie de Kralendrijk, capitale miniature de l’île, où la Marina a installé des bouées. Obligatoires et payantes. Interdiction de jeter l’ancre dans les fonds coralliens. Parfait. Sauf que pour une raison indéterminée, les bouées que nous attrapons sont reliées très court au gros bloc de béton posé au fond. Très très court! S’ensuit un feuilleton picaresque digne des grands moments du cinéma muet. Quoique muet, non, pas vraiment… Sur Mothaline, Michel a la charge de remonter la bouée avec la gaffe, mission impossible bien sûr. Francine, qui ne peut pas voir la raison de ce contretemps commence à s’agiter. Et Michel à sérieusement s’énerver contre cette S…. de bouée. Francine alors, lâche la barre et se précipite pour prendre l’affaire en main! Et la gaffe. S’ensuit un dessin très animé où la gaffe manque de se transformer en objet contondant pour petit meurtre en famille. Sur la Belle, ce n’est pas mieux pour l’énervement mais nous tentons de communiquer par gestes… Nous essayons par principe d’ancrer sans cris, à l’aide d’un langage gestuel dont le codage reste hélas encore parfois mystérieux pour nous-mêmes. Surtout quand une S…erie de bouée refuse de se laisser arraisonner. Je suis “bouée”, Luké pilote. Premier passage, j’attrape la bouée, yeah!!!! Et tire, force de tous mes biceps –et j’en ai plusieurs- pour la remonter et passer mon cordage. Ventredieu, mille sabords, que dis-je, fichtre! Impossible de la lever de plus de 50cm au–dessus de l’eau. La hauteur du catamaran étant de plus de 2 m, j’ai beau me pencher outrageusement et étendre mon bras comme un chimpanzé élastique, rien n’y fait: la gaffe, qui a accroché l’anneau de la bouée, m’est arrachée des mains deux fois. La Belle sur son erre fait le poids. Et pas moi. Je récupère la gaffe à l’arrière. Luké, qui ne comprend pas cette histoire de bouée ras du sol (rien de prévu dans le décodeur pour ce type de situation) arrive au galop. Lui Tarzan, moi faible Jane: il va l’attraper, lui, cette bouée! Oui, oui. Pour l’attraper, ça, pas de problème non plus… C’est la suite qui cloche toujours. La gaffe se tord, se plie mais ne rompt pas (une chance!) et il lâche, lui aussi… Hé, hé, ricane-je, ce qui ne nous avance guère mais soulage. C’est là que nous voyons un petit youyou manœuvré à la rame par une charmante dame Québécoise venir au secours des bateaux les uns après les autres. Elle a du mal, elle aussi, même à partir du dinghy à soulever la bouée, passer le cordage et me le relancer. Curieusement, Charly a réussi sans problème -alors qu’il est seul- à amarrer Mojito? Et oui, il a pris la seule bouée “préparée” par un plaisancier avec un long bout et un flotteur. Lequel arrive à fond les voiles une heure plus tard. Et obligera Charly à déménager: C’est SA place… Bienvenue à Bonaire.
Nous voilà dans la première île des “ABC”: A pour Aruba, B pour Bonaire, C pour Curaçao! Mais géographiquement et sur la route de l’ouest, Bonaire est la première île. Que nous connaissons pour y avoir passé de bons moments et vu de superbes fonds avec Ben (et Gaspard, notre Milou) il y a presque 15 ans. Et bien…ça n’a pas changé! C’est la Hollande aux Antilles, bref: les Antilles Néerlandaises! Quoique non, depuis le 10 octobre 2010 les Antilles Néerlandaise n’existent plus. Pas de tremblement de terre, juste un changement de statut. Après avoir été “Colonie Hollandaise” jusqu’en 1800, passée sous la couronne d’Angleterre pour 15 ans puis retour en Hollande, Bonaire, depuis était une île autonome, avec un parlement élu, ses lois et un Gouverneur d’opérette représentant la Reine. Depuis 17 jours, Bonaire est devenue une région Hollandaise, vote comme n’importe quelle municipalité du plat pays et fait partie de l’Europe. Il ne manque plus que les tulipes. Sauf, “car il ya un sauf”, que le Florin Néerlandais ou Guilde ne va pas être remplacé par l’Euro mais par le Dollar, déjà présent depuis longtemps dans les caisses de tout bon magasin. Mais à première vue, ça n’a rien changé!Kralendijk, au nom imprononçable, est la capitale et à vraie dire l’unique “ville” de Bonaire! Environ quatre ou cinq rues et un nombre limité de ruelles. Première rue, le front de mer “Kaya Craane”. Restaurants et bars divers. En arrière, l’incontournable “Kaya Simon Bolivar”, siège de tous les joailliers, boutiques de luxe et restaurants pour touristes. Plus loin, dans le genre “Hollandais toujours”, la “Kaya Nikiboko Zuid” et la “Kaya Nikiboko Noord”. J’en conclus: que “Kaya” signifie rue, “Zuid”, sud et “Noord”, nord. Ce qui laisse de marbre Luké quand je lui annonce ma découverte! Ces rues permettent à deux voitures de se croiser, mais vu le nombre de voitures et la hauteur des “casse-pattes” qui jalonnent le circuit, on peut y déambuler en piéton sans trop de risques. La ville est dédiée au shopping de luxe, l’objectif: saigner les touristes Américains qui sont la principale ressource. Qui étaient semble-t-il. Soit nous sommes en très mauvaise saison, soit la crise frappe fort. Pas un chat dans les rues. Et encore moins dans les boutiques qui affichent toutes des soldes faramineuses. Les prix n’étant pas indiqués, on peut s’attendre à tout mais surtout à ce que soldes ou pas, ce soit cher! Je reviens à mes chats qui ne sont pas dans les rues: après le Venezuela et ses colonies de chats errants et de chiens faméliques, nous ne verrons pas un seul animal en liberté ou abandonné. Au milieu de Disneyland, ça ferait désordre. Car nous sommes à Disneyland! Sur Main Avenue pour être plus précis, enfin, “Kaya Bolivar”! A chaque minute, on s’attend à voir surgir Blanche-Neige avec un nain, et on est presque déçus quand on passe devant une boutique, ni Pluto ni Mickey ne sont là pour nous accueillir. La ressemblance est étonnante: des couleurs acidulées,des maisons de poupées festonnées et des murs peints de fresques un peu partout. L’impression d’évoluer dans un dessin d’enfant. L’atmosphère désertique ajoute à cette sensation un peu irréelle. Et la propreté! C’est curieux à dire mais une ville où pas un papier, pas un mégot, pas un rogaton quelconque ne jonche les trottoirs, ça angoisse. Où est planquée l’équipe de nettoyage et son planning? On se retrouve à serrer nerveusement son papier de bonbon dans sa main, non pas qu’on ait l’intention de le jeter à terre, non, non, mais il ne faudrait pas que surgisse un surveillant avec une tête de Rapetou qui lui, pourrait le supposer. On serait mal.A notre dernier séjour, “Chez Claudette” était une minuscule boutique au fond de la rue… Depuis, des dollars ont coulé dans la caisse. Cette photo est spécialement pour à ma maman, Claude dite Claudette!Oui, les poubelles aussi sont décorées, avec des styles différents: ici, un “support-surface” à base de pinceaux de peintres en bâtiment collés!Pas d’affichage papier ou électrique sur les murs dans ces contrées, mais de magnifiques fresques peintes. Publicités, informations ou décorations, les murs s’expriment. C’est beau, c’est coloré, c’est bien fait. Et ce n’est jamais tagué! Stupéfiant…Avec cette jolie personne…Et ce vieux marin…
Le supermarché Cultimara, “Tout sous le même toit”!
Bravo Henk pour tes “murals”
Sous un passage entre deux rues, un autre artiste, dans un genre rococo-grassouillet plein de fraicheur:
Et en me retournant, je découvre cette scène champêtre typiquement Bonairienne: les ânes et les petits perroquets verts de l’île…
Les rues sont semi-désertes, je me promène avec mon appareil à la recherche de fresques. Un bruit de griffes et de chute. Je scrute…personne. Le bruit provient d’un container à ordures qui a l’air tout à fait normal. Un animal jeté à l’intérieur? Tout à coup, il est devant moi, prêt à affronter l’ennemi. Il a quitté sa cachette derrière le container et renoncé à grimper le mur trop vertical. On se regarde, j’entends la musique de “Il était une fois dans l’Ouest”. Et me recule. D’abord il a des dents et semble prêt à sauter. Et puis je veux une belle photo, alors ne pas l’effrayer!
Il était une fois à Bonaire… mon iguane!
A Bonaire, prise de risques: nous essayons un fast-food “Dutsh cuisine”. C’est qu’on n’a pas peur, nous! Déjà, un fast-food, et en plus de la cuisine Hollandaise. Il y a bien des restaurants, mais pratiquant des prix qui découragent toute initiative et esprit d’aventure. Ayant un souvenir assez précis de la gastronomie locale, le choix est vite fait: quitte à mal manger, autant ne pas se ruiner. Et on n’a pas été déçu.
Le matin, plongée sous le bateau. Une petite merveille. Luké gratte la coque et toute une faune se précipite pour gober les particules de coquillages et d’herbe. Je palme tranquillement en suivant chirurgiens bleus, perroquets verts et autres poissons-anges. Un beau poisson-trompette s’éloigne doucement. Un bruit de moteur me fait sortir la tête hors de l’eau: je suis à quelques mètres du front de mer, en pleine ville! Le bruit des moteurs de voitures ne gêne que moi: sous la surface, chacun vaque à ses occupations sans se préoccuper des klaxons. Bonaire a su préserver ses fonds coralliens. C’est son gagne-pain. La seule industrie de l’île est le tourisme. Les salins –où les esclaves travaillaient les pieds nus rongés par le sel et dormaient dans des sortes de niches d’un mètre vingt de haut- ont fermé le jour de l’abolition de l’esclavage. Et ce n’est qu’en 1950 que le 1er hôtel a vu le jour: depuis, la plongée sous-marine est le nouvel or bleu. Et il y a de quoi!
Le temps continue a faire ses caprices. Nous nous retrouvons tous à l’envers, le nez vers le large, l’arrière pour certains presque sur la route! Renseignements pris, un certain Tomas, tempête tropicale en devenir de cyclone, se dirige vers nous. Il descend plein sud. D’après nos observations, à Luké et “moin mèm”, il devrait passer bien au dessus des îles ABC. Nos amis pensent qu’il se dirige sur les ABC. Dans le doute, on change de bouée pour se mettre à l’écart du bord de côte en béton! Chacun y va de ses prévisions, il y a les alarmistes –ouh lala laaaa… regardez, tous les voisins sont partis se calfeutrer à la Marina- et les autres. Il est à noter que l’employé de la Marina est allé voir les bateaux Hollandais ou autres pour les avertir du danger, et surtout les inviter à se rendre dans la Marina, chère mais abritée. Ce qui est faux. Si un cyclone passe sur Bonaire, ni la Marina, ni nous ne sommes à l’abris. L’île est plate comme une galette et les vents déboulent à toute allure. Et les Français, ils se renseignent avant de sombrer dans la paranoïa. Alors, le garçon, il n’a même pas pris le risque de venir nous voir!
En attendant, en bons Gaulois, on se soutient en organisant des apéros plus ou moins soupatoires d’un voilier à l’autre. Luké se lance dans la fabrication de baguettes à la Française (superbes!). Charly nous cuisine son fameux “Poulet au vin” (délicieux!), Luké sa légendaire soupe de poisson-rouille-croutons…Se brancher sur Internet nécessite l’achat de cartes mais tant pis, on prend des nouvelles de la famille, on écrit. Benjamin va de Tokyo à Kobe en passant par Osaka, Manon stresse car son examen final pour son diplôme d’infirmière est le 5 novembre, et je peux parler avec ma mère, “skyper” un peu, tout ça dans une chaleur étouffante qui s’accroit au fur et à mesure que Tomas “bouffe” notre air et arrive sans se presser. Bien sûr, la houle générée par le cyclone, qui passe près mais pas sur nous, se déchaine dans la nuit vers 2h du matin. Des bourrasques, des éclairs, une pluie diluvienne et une houle qui nous fait sauter comme un petit bouchon. Et il pleut pendant deux jours.
Et avant de quitter Bonaire, Jeanne nous fera un coup d’éclat en s’attaquant à un …doberman. Un jeune et pas très futé, c’est sûr, elle va profiter de son inexpérience pour lui grogner à la truffe suite à une inspection de son anatomie qu’elle réprouve. Bon, un peu pus tard, elle sautera dans les bras de Luké en croisant un teckel… On se demande si elle n’a pas un problème de mise au point?
quel délice ces photos et commentaires !!! j"espère que le pied et le dos vont mieux...
RépondreSupprimerbises
Alain Andremont
On s'est remis! Quelle dure vie que la notre... Merci pour ton mot et gros bisous, Marie
RépondreSupprimer