La nuit, tous les chats sont gris…Et les bateaux aussi….
Vieux proverbe marin
Pour cause d’élections, nous avons du retourner au Supermarcado avant de lever l’ancre. Partir sans vin Chilien et sans bière dans des îles désertes n’était pas raisonnable. J’ai fait aussi provision de fruits et légumes quand même ! Mais pas un gramme de farine de blé depuis des semaines. Parfait. Je vais en profiter pour faire des expériences avec la farine de maïs. J’engrange farine de maïs complète jaune et farine de maïs blanche, et tant qu’on y est farine de maïs mélangée à de la farine de riz. On va s’amuser… On est là pour s’adapter et découvrir, non? Si on veut manger Français, on reste en France. Je dis ça, mais comme tout le monde de temps en temps, nous sacrifions au “paradoxe Français” et soignons nos artères grâce à une provision gérée au plus près de confit de canard, cuisses, manchons, tout ce qui trainait dans les rayons en Martinique. En attendant, je vais profiter de la situation pour tester auprès de mes cobayes de nouvelles idées. Et de nouveaux plats locaux.
Ce départ est un « faux départ ». Nous faisons le tour de Margarita au petit pas, par l’est, pour mouiller au nord de l’île et être plus près de Blanquilla. Pourquoi s’enquiquiner à naviguer une journée entière et une nuit, alors qu’une baie engageante (enfin, on n’a pas vu grand-chose !) se trouve à mi-chemin ? Nous voyageons à la Suisse : « Il n’y a pas le feu au lac ». Départ à 11 h de Porlamar, 12 nœuds de vent, une mer d’huile. Arrivée en pantoufles à 18h à Juan Griego.
Charly n’aime pas les navigations de nuit, seul sur Mojito, rien d’amusant. Moi de même. C’est à peine si je vois le bout des coques. Pourquoi fais-je quart (enfin, la moitié !) de nuit, me direz-vous, et avec justes raisons ? Plusieurs réponses : Luké, la nuit, il dort. C’est un humain tout ce qu’il ya de classique de ce côté-là. Moi, la nuit j’adore lire, regarder des films. Dormir aussi mais en navigation je dors encore plus mal la nuit que d’habitude. Par contre, le jour, j’hiberne comme une nichée de loirs. Le souci, car il y en a un : le jour, je n’y vois pas très loin, et la nuit, je n’y vois pas du tout. Ce qui m’angoisse parfois ! Surtout depuis que le radar est en grève. Jusqu’à présent, j’ai plutôt vu « plus de choses » que pas assez. J’ai vu des bateaux qui nous assaillaient en traitre (le Capitaine et le mousse à l’époque, alertés par mes cris, m’avaient affirmé que ce n’était en fait que la lune en halo derrière un nuage, avec deux étoiles comme des feux de mâts, et qui faisait des ombres Chinoise. Je veux bien…), des lumières de cargos nous fonçant droit dessus (des étoiles au raz de l’horizon… soit), et j’ai entendu des voix chuchotant sur les vagues…Rien bu, rien fumé, juste flotté sur l’Océan au milieu de la nuit et de nulle part. Malgré tout, le Capitaine prend le risque et la couchette. Moi, je veille, l’œil et l’oreille aux aguets….
Au milieu de l’après-midi, la Kanelli avec Oche aux commandes nous double en cours de route. Il va aussi s’ancrer pour la nuit à Juan Griego. On se dit « Au revoir » car on espère bien se revoir !
Mercredi 30 septembre 2010
Il était donc prévu un départ pépère au lever du soleil, à la fraiche. Après tout, nous avions fait cet arrêt pour profiter d’une bonne nuit de sommeil. Les pêcheurs en ont décidé autrement. Vers 3h du matin, un vacarme de moteurs, de cris, d’interpellations nous réveille. Un cyclone spontané ? Presque : juste le départ au travail des pêcheurs. Le bruit fait partie de la vie au Venezuela. Les enfants naissent dans le bruit et grandissent dans les cris car pour parler il faut dominer la musique. Personne n’a idée que le bruit pourrait empêcher quelqu’un de dormir, par exemple ! C’est naturel : au milieu de la nuit, si on a besoin d’interpeller son voisin, là-bas, au bout de la rue, on pousse un rugissement, il répond par un barrissement, le tout dans l’indifférence générale. Et bien, nous ça nous a réveillé. Luké surtout qui en a sournoisement profité pour appeler Charly à la VHF « Charly, tu es réveillé ???? » … « Maintenant oui » répondit Charly, en vrai faux jeton car il était déjà réveillé lui aussi. Alors, puisqu’on est réveillés, si on partait ?
J’ai fini ma nuit sur le pont, quel plaisir de dormir à l’air, partageant mon oreiller avec Jeanne, bien sûr.
L’aube s’est levée, elle, en silence. Mais avec une majesté telle que je me retrouve à 5h du matin avec l’appareil photo à la main. Les rayons du soleil surgissent derrière les nuages, les couleurs sublimes… N’importe quoi, je ne vais quand même pas essayer de décrire un tel spectacle alors que j’ai des images qui parlent toutes seules? moteur.
Pas un brin de vent. Enfin, si : 10 nœuds. Ce qui ne va pas pousser nos 20 tonnes. Moteur….
Au milieu de la matinée, le cata est abordé par passager épuisé, à bouts d’ailes, les pattes flageolantes: Pancho!
Ola, yo soy Pancho, el pajero!
D’abord timide,
Puis moins….
Enfin, carrément familier.
C’est alors:“Je l’ai vu!” s’écria la chasseresse.
Cordage: cachette… raté.
Je vous dis que je l’ai vu!
Tant pis, agissons à découvert
Je l’ai pourtant dis que je l’avais vu, ce truc volant.
Je suis làààààà…..
Je sais, j’aurais pas du essayer de lui sauter dessus…
Revenons à des valeurs sûres… mais je le vois encore!
Jeanne n’a toujours pas compris pourquoi elle ne pouvait pas jouer avec Pancho. Je ne suis pas persuadée que ces jeux lui auraient plu, à Pancho. Il a fait le tour du propriétaire, visité l’intérieur et prit ses quartiers dans les cordages. Une fois bien reposé, et après avoir décliné poliment les miettes de pain offertes (que Jeanne a englouti dès qu’elle a été détachée), il s’est envolé… sur Mojito!
Découverte d’une île perdue….Personne ne vit en permanence sur la Blanquilla. Seule, une base reculée de Guardacostas est installée au sud de l’île. Il parait qu’ils sont relevés tous les deux mois, mais que font-ils pendant ces deux mois, les malheureux, il s s’étiolent? Arrivée à 14h30, mouillage devant une plagette avec en arrière plan de maigres arbustes et ...des cactus !
Un beau soleil, un joli paysage, toute une mise en scène pour nous endormir. Et nous préparer à la première de plusieurs nuits d’enfer.
Et sec…
Mais le drapeau est hissé!
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