vendredi 24 septembre 2010

BAMOS A LOS TESTIGOS... Du 6 au 7 septembre 2010

Lundi 6 septembre, 17h

« J’ai vu des archipels sidéraux ! Et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts aux vogueurs »
                    Arthur Rimbaud


Et nous, nous avons vu « Los Testigos »…
Première précision pour les non hispanophones dont j’ai fait longtemps partie (je ne suis pas plus avancée en Espagnol depuis mais j’ai fini par regarder dans le dictionnaire !) : malgré des consonances équivoques, la traduction de « Los Testigos » n’est pas « Les Testicules » (de qui d’ailleurs ?) mais « Les Témoins ». Témoins de quoi, l’enquête n’est pas finie.  Cet archipel constitué de deux îles habitées et de quelques petites îles désertiques est la porte d’entrée pour le Venezuela quand on arrive des Antilles en bateau. Une entrée confidentielle car, malgré la présence d’un petit escadron de « gardacostas », Los Testigos ne sont même pas mentionnées dans le guide Ulysse que nous avons sur ce pays !
Depuis notre dernière visite qui remonte quand même à environ 16 ans, la famille habitant ces îles s’est développée. Car si aux Testigos, les habitants –peu nombreux- sont « les Testigeros », avant tout ils sont « La Famille ». A l’origine, une famille de pêcheurs s’y est installée. Spécialité : la pêche aux requins. Entre autres. Puis un poste de gardes côtes. Surveillance des trafics de drogue entre le continent et les îles du nord. Et protection de la population qui déjà d’elle-même traque le moindre petit trafiquant qui essaierait de  pointer son nez !
Nous retrouvons avec émotion nos amis les pélicans. Qui n’a jamais amarré son annexe à un ponton sous l’œil réprobateur et le long museau d’un pélican montant la garde sur un pilier ne sait pas ce que c’est que d’être accusé à tord. Accusé de quoi, lui seul le sait. Mais la tête penchée en avant sous le poids de cet énorme bec presque aussi long que son corps, le pélican de garde vous suit du regard sans broncher. C’est son ponton peut-être ?
Certains choisissent plutôt des barques que des pontons

Ses compagnons s’ébattent avec le sérieux propre à l’espèce. Le pélican n’est pas là pour rigoler mais pour pêcher. Et pour pêcher il faut plonger. C’est là que ça se gâte. Le poisson –les poissons, vu le gabarit du garde-manger portatif- repéré, il se jette. En vrac. Bec en avant et le reste comme on peut. La première fois, on crie « un homme à la mer ». Et un gros. Mais non, un pélican qui fait les courses. Le plouf est impressionnant. Peu après, il ressort à tire-d’aile, le marché fait. La technique nous semble rustique et peu élégante, mais elle est diablement efficace.
Autour de nous, le ciel est constellé des silhouettes étonnantes des frégates. Nous les avions surnommées « les ptérodactyles des Antilles », tant leur large envergure et leurs ailes découpées font songer aux grands oiseaux de la préhistoire. Les frégates ne plongent pas. Elles repèrent l’inconscient qui nage un peu trop près de la surface, opèrent un rase-motte tout en finesse et repartent diner en bec.
Majestueuse frégate!

Autant les pélicans, avec leur air de vieux moralistes et leurs manières brouillonnes de pêcher nous font rire, autant nous ne pouvons qu’admirer l’élégance des frégates. N’oublions pas nos éternels Fous de Bassan, qui s’agitent en permanence au-dessus de l’eau. Et que l’on appelle « Gabiànes » ici…ça alors !
Pour les « estrangersssss », à Palavas Les Flots (centre du monde) et dans le sud Occitan, nous les appelons « Gabians ».
La faune ensuite est limitée : lézards à tête rouge, quelques iguanes timides (que nous ne verrons pas d’ailleurs), des chèvres semi-sauvages qui représentent la viande fraiche sur pattes. Des cigales géantes et assourdissantes. Et des chiens bien sûr. Mais pas les chiens faméliques des Antilles. Des chiens de famille, nourris, gentils (sauf avec Jeanne, l’accueil de l’étrangère n’est pas encore au point) et libres. Tellement libres que la reproduction donne des mélanges étonnants où on retrouve du « tiens, il me fait penser au genre bichon de l’autre plage » ou « oh, il a du cocker celui-là, étonnant ». Comme quoi, tous les canins étrangers n’ont pas été mal accueillis.
Les paysages ne sont plus ceux de Grenade ou des Grenadines. La végétation est beaucoup plus sèche, arbustes torturés et mancenilliers en bord de plage. Le mancenillier c’est « l’arbre de feu ». Marqué à la peinture rouge et pratiquement éradiqué dans les îles Françaises. Son venin cause des brulures terribles. En particulier si on se réfugie dessous pour se protéger de la pluie…et que l’eau dégouline sur la peau après avoir fait le plein de poison au passage. Les toucher est fortement déconseillé ! Seuls les iguanes en sont friands : ils mangent les fruits comme des bonbons…La nature est bien faite, chacun peut y trouver son compte.
Isla Iguana , vue de Tortuga Grande
 Les fameux « Témoins », ne seraient-ce pas ces immenses cactus qui tendent les bras comme pour implorer le ciel ?

En attendant de les voir de plus près lors d’une promenade, nous partons ancrer sur Isla Iguana , deuxième île en taille après Testigo Grande, juste en face, allez, 1km à vol de pélican, sur laquelle les festivités commencent ce soir.
Depuis ce matin, un entrainement féroce pour la course des « Lanchetas » prévue demain, se déroule entre les deux îles. La Lancheta, c’est la Formule 1 des pêcheurs Vénézuéliens, et en particulier des Testigeros. Explications :
La voiture classique, le modèle familial de locomotion, c’est le « Pinéros », la barque de pêche d’environ 8/10m, qui permet d’aller travailler et de se déplacer avec la famille. Pour aller rendre visite au frère ou au cousin, boire un apéro en palabrant sous un raisinier-bord de mer –bel arbre adorant le sable et l’eau salée- et aller à Margarita en 2 ou 3 heures pour vendre le poisson , se faire soigner, faire des courses. Pas de boutique aux Testigos. Un bateau apporte chaque semaine l’essentiel commandé par les habitants pour l’alimentation quotidienne.
La « Lancheta » c’est une petite et fine barque, au nez effilé superbement relevé, nantie d’un moteur d’un moteur de 40 chevaux pour les pilotes de moins de 20ans, et d’un moteur de 75 chevaux pour les plus de 20 ans ! Sachant qu’une Lancheta a un poids d’environ 100kg pour 5 mètres de long, ce sont de petits obus dressés sur l’hélice du moteur qui déboulent au milieu de gerbes d’écume. Les modèles « Pinéros » ou « Lanchetas » sont tous, mais alors tous, peints soigneusement et amoureusement, dans des couleurs vives ou pastels, multicolores. Des œuvres d’art.
El Puma! Caramba!

Une jolie mauve...


C’est au milieu d’un bourdonnement de moteurs en furie que nous nous  installons devant la plage principale, celle où il y a la salle des fêtes en plein air, la buvette et accessoirement le poste des Gardacostas.
Poste des Garadacostas, équipé solaire!
 La musique arrive jusqu’à nous (pas difficile vu –ou plutôt entendu- les décibels- qui nous invite à descendre à terre sans délai. Une étape importante des festivités se déroule déjà : l’élection de Miss Testigos ! La foule est agglutinée autour de la salle (4 piliers, un toit et le sol bétonné pour danser, essentiel !) où le présentateur s’égosille en présentant les candidates. Jolies ou moins jolies –tout dépend des critères- elles sont ravissantes de fraicheur. Mais déjà entrainées au dur métier de Miss. Démarche rythmée, petit pas de côté, déhanchement, sourires éblouissants. Peut-être avons-nous vu ce soir-là une future Miss Univers (Car Vénézuélienne plusieurs fois, Miss Univers) ? Nous avons été un peu dans le flou quand aux résultats. En fait, chaque candidate a été » élue « Miss Quelque Chose ». Miss de la Mer, Miss des Pêcheurs, Miss des Perles, Miss du Soleil.... Il nous a même semblé qu’à un moment l’animateur se trouvait à court d’idée en appelant "Miss Langosto". Miss Langouste? . Enfin, la dernière est déclarée « Miiiiiss Teeeeestigos »! Passation de couronne par la Miss 2009. Applaudissements  nourris. Musique ! La piste est vite envahie par une foule compacte.
Miss Testigos porte un tee-shirt rayé bleu.

Vente de Perros Calientes!
Quelques petites échoppes (Trois !) proposent une spécialité qui remue en  nous des souvenirs émouvants. Ah, le « Perros Calientes » de Porto La Cruz, dégusté, non, avalé en plusieurs exemplaires par Luké et Ben (en pleine croissance à l’époque…). Lors de notre précédent séjour au Venezuela. 1997…Snif….Que de souvenirs ! Ce passage est spécialement dédié à Ben, grand amateur frustré de Perros Calientes depuis! Luké pas frustré du tout,  retrouve son rythme pour les …déguster ! Précision: le Perro Caliente peut se traduire par "Chien Chaud", mais il est plus connu en tant que "Hot dog". Les Vénézuéliens au moins  La buvette est un autre point stratégique. La fête est sponsorisée par les bières « Polar Light »et "Solera Light" 3,5% d’alcool chacune Je comprends maintenant à quoi servent les poches des bermudas de bain pour hommes : à caser la bouteille de rhum ou d’anis tout en dansant. Pour compléter la « légèreté » de la bière, certains dansent ainsi avec la bouteille commune.
Sous les bannières de la bière "Solera light", Français à l'ombre.


C’est la fête. Nous dansons comme des forcenés sur des rythme qui feraient trembler le fiston et plier de rire Manon. A vrai, dire, on ne sait pas trop: par moment de la salsa ou du compas, super. Et puis, du genre ragga, ou pire, enfin, le genre qu’on en connait pas. Avec toujours un arrière plan sonore "chaloupé" (normal ici) engageant à rouler des hanches. Mais on s’amuse vraiment ! Tout le monde s’amuse, et alcoolisés ou pas, tout est toujours bon enfant avec moult rires et plaisanteries. Pas de débordement, pas de gestes déplacés.
Vers 23h, retour au cata. Mais Charly lui danse jusqu’au bout de la nuit !

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