lundi 17 janvier 2011

RIO PALOMA, LA MARCHE DES MANCHOTS… Isla Verde, San Blas, le 17 janvier 2011

“Un général ne se rend jamais même à l’évidence”  (Jean Cocteau)

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Christine et Pierre arpentent en profondeur les San Blas depuis des années. Ils ne s’en lassent pas (et ils n’ont pas tord!). Avec Christine, j’ai passé un long moment sur Isla Verde, près de Nargana. Isla Verde est occupée par deux familles, établies chacune à un bout. Les iles n’appartiennent à personne, seules les cocoteraies appartiennent à des familles dont les membres vont, à tour de rôle, entretenir et récolter les noix de coco. Désignés par le Chef des Cocoteraies, pour un séjour de deux à trois mois en général. Il y a encore peu de temps, la monnaie, c’était … les noix de coco! Ce qui fait qu’il est interdit de ramasser les noix de coco quand on se promène sur une de ces iles, c’est comme si on piochait dans le porte-monnaie de quelqu’un, ça ne se fait pas. De nos jours, hélas, la noix de coco a été remplacée par le Balboa, monnaie officielle de Panama, qui n’existe plus physiquement à part quelques pièces, et qui est remplacée par le Dollar Américain. Curieux pays qui a pour monnaie “officielle” une monnaie qui n’existe plus –mais dans le journal, les sommes vertigineuses consacrées à l’agrandissement du canal ou autres sont toujours en Balboas- et pour monnaie effective, une monnaie étrangère. Dans les boutiques, on parle en dollars et les prix sont affichés aussi bien en dollars qu’en Balboa… Enfin, bref, plus de noix de coco, donc! Ce qui est d’ailleurs plus pratique pour le dit porte-monnaie. Ocassinio, qui va nous guider pour remonter le Rio Paloma, lui, choisit de se faire payer en nourriture: à quoi peuvent servir les dollars quand les boutiques sont vides? Et ces jours-ci, il y a rupture de stock, le bateau ravitailleur n’est pas venu à Nargana: un oubli?  Les Kunas de ce “quartier d’iles” manquent cruellement d’oignons, farine de maïs, riz etc. Les trois bateaux préparent donc des sacs d’aliments divers!

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Ocassinio

Nous voilà partis, à la queue leu leu, en annex, vers le continent et l’embouchure du Rio. Il est tôt le matin, l’air est agréable, presque frais, les oiseaux chantent… Non, les oiseaux ne chantent pas: la forêt bruisse, craque, grogne. “Et il y a quel genre de bestioles par ici?”… Ah, des crocos. Bon, on connait. Des toucans, des perroquets, des singes (mais on ne verra pas la queue d’un). Et des tigres! Encore???? Oui, le tigre ne connait pas les frontières et les Tigrons de Colombie se promènent très bien par ici aussi. Bof, une légende: si on voit un jaguar, je redescends le fleuve à la nage!

P1260286Un pivert daigne nous saluer, pas de tigres à l’horizon, je ne nagerai pas….

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On scrute, on scrute… Le fleuve se transforme vite en cours d’eau peu profond, parsemé de rochers. Si peu profond qu’Ocassinio fait accoster les trois annexes, bien garées sur une plage de graviers, et nous continuons à pieds. Dans l’eau? Voilà qui va nous rafraichir. Il montre l’exemple en prenant la tête du groupe, machette à la main.

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Pierre est médecin-urgentiste et ne se déplace pas sans son hôpital de campagne, dans un lourd sac en caoutchouc!

Au début, on essaie de ne pas trop se mouiller, et puis… on y va franco, après tout, mouillé pour mouillé! Selon les endroits, l’eau nous frôle les fesses, et il faut se méfier de petits trous entre les rochers. Ocassinio nous guide d’un côté ou de l’autre.

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Il est vrai qu’en marchant plutôt le nez pointé vers l’eau pour surveiller les trous et les cailloux, on doit en rater des trucs! Mais impossible de rater notre pub ambulante pour le Confo Martinique (souvenir du Tour des Yoles) et… le sac Cultimara, le supermarché culte de Bonaire.

Peu à peu, le fond devient boueux. Puis franchement fangeux. Enfin, carrément “sables aspirants”. Nos pieds, nos mollets et parfois pire s’enfoncent dans une boue collante, à effet de succion pervers qui arrache nos “crocs” en plastique, et tente de les garder en plus. On patauge, on godille sur une jambe, en cherchant la chaussure dans cinquante centimètres de boue tiède, on reste parfois scotchés en plein élan, l’air un peu couillons… De vrais manchots dans la rivière!

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J’ai l’air décontractée comme ça, mais je suis bien engluée, j’ai le sourire crispée…  Et j’ai failli perdre mes beaux “pieds de Mickey” vert fluo plusieurs fois!

Alors j’ai mis au point la technique dite “de la libellule”: ne plus essayer de poser délicatement un pied après l’autre (ils s’enfoncent de toutes manières) mais bondir légèrement le plus vite possible en agitant les bras pour aider l’envol… Efficacité réduite mais bon, parfois, ça a marché.  

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Et hop…. me voilà!

La technique a ses limites et en voilà une:

P1260321La plage du Tigron!!!!

Sur le bord très boueux-gluant, nous sommes éberlués par la taille … des empruntes ultra fraiches, voire de la minute qui vient de s’écouler, d’un beau morceau de Tigron. Pas une mauviette, le grand chat, vu les papattes….

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Il fait un bon 37, l’animal, mais aussi bien en longueur qu’en largeur. Et il en quatre, des pattes, bien griffues. On peut suivre (euh, du regard juste) ses traces qui s’enfoncent dans le sous-bois. Ocassinio nous explique que le “tigre” peut être très dangereux, il a une force terrible et une rapidité incroyable, mais qu’il n’attaque que si il se sent menacé. Ou si il a très faim. OK. Espérons qu’il n’y a pas de Tigron paranoïaque dans le coin. Ou affamé. Affamé et parano, c’est possible? On redescend le fleuve, retour vers les annexes!

Ocassinio fait gouter aux intrépides le “piment sauvage”: un petit fruit vert, piquant, très piquant même. Il pousse sur de petits arbustes et les Indiens s’en servent dans leur cuisine. Luké ne peut s’empêcher d’en croquer un bout (Il arrache parait-il, la piment local) et d’en ramener un rameau bien chargé pour sa consommation personnelle.

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Le retour nécessite quelques pauses, la fatigue se fait sentir: nous marchons depuis seulement trois heures mais faire de l’équilibre sur les rochers, glisser sur les cailloux et s’engluer dans la boue, ça double le temps!

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Alors, une petite baignade est la bienvenue… Vue la profondeur ((30cm…), on fait dans la balnéothérapie: allongés, le courant nous masse, l’eau est fraiche et douce, un régal.

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Je sais, j’ai le chapeau près du bonnet, enfin bien enfoncé sur la crâne: j’ai perdu mes lunettes de soleil, c’est futé. Pour mieux distingué les cailloux et éviter de me retrouver le croupion dans l’eau (et un bleu aux fesses), je les ai enlevées et accrochées bêtement sur le devant de ma chemise. Et au bout d’un moment, penchée en avant, sautillant de part et d’autres… plus de lunettes. Le chapeau se porte donc vissé à fond!

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Merci à Christine et à Pierre pour la plupart des photos, notre appareil ayant rapidement perdu son tonus et son énergie. Bien sûr, nous avions oublié les piles de rechange…

P1260363Tant qu’à être englués dans la boue, autant en profiter!

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